Des hommes rigolaient autour du feu et se racontaient leurs histoires mais Kaede n’était pas là pour les écouter. Solitaire, il préférait généralement rester chez lui; une petite cabane bien simple qu’il s’était construit un peu à l’écart des autres. Il lui arrivait cependant de profiter de l’ambiance nocturnal pour vagabonder dans le campement des hommes qu’il côtoyait. Un peu comme un fantôme, il venait souvent scruter ces lieux sans raison précise. Bien que ses habits sombres fondaient dans le décors, un regard c’était posé sur lui. C’est au travers des flammes qu’il reconnut le visage d’une femme bien particulière. Accompagné d’un sourire malicieux, il fixa cette dernière pendant de longue seconde en tentant d’interpréter la lueur de son regard. Était-ce la haine ou tout simplement le reflet du feu devant lequel elle se tenait? C’est que la pauvre avait eu le malheur de se prendre dans l’un de ses pièges et Kaede n’avait pas l’habitude d’offrir un accueil chaleureux à ses proies. Sans doute qu’elle ne serait plus de ce monde sans l’interférence de son sauveteur. Il ne pouvait pas nier qu’elle avait sus endurer bien plus que d’autres mais il trouvait tout de même cela méprisable que sa proie lui soit ainsi soutirée, après tout, elle était une intruse. C’est vrai qu’il lui arrivait aussi d’accorder de la valeur à certaines personnes et comme il avait été vaincu, il valait sans doute mieux accepter le jugement de son adversaire ou du moins, pour l’instant. Quoi qu’il en était, il préférait éviter les affronts directes. Si un problème survenait, il prendrait le rôle du serpent qui bondi sur sa proie au moment opportun.
Comme de rien, il était allé se planter à ses coter mais à l’abri de tout regards, il avait la main bien posé sur le canif enfoui dans son long manteau noir. Que pouvait-il connaitre de ses intentions? Il n’était pas inadmissible que celle à qui il avait fait du mal puisse vouloir se venger mais il n’allait certainement pas trembler devant la mort qu’il tentait si bien d’incarner.
«Comment se porte vos blessures?»
La satisfaction de ses actes refaisait surface sous la forme d’un sourire, Kaede n’avait pas l’habitude de chercher à être aimé mais bien que les choses semblaient différentes, il ne cherchait pas non plus à la provoquer; c’est qu’il n’avait aucune notion de rancune. Bien qu’il comprenait un peu cette chose qui hantait le cœur de certains, pour lui, le tout n’était qu’une question d’instinct et de survie. La présence de principes et de sentiments se faisaient peu sentir dans son être.
«C’est assez rare qu’on parte à la rescousse des autres par ici. Tu te considères peut-être chanceuse mais sache que les poussins pour qui on a cassé la coquille n’ont pas les même avantages que ceux qui l’on cassé seul.»
Parce que c’était un peu ce qui était arrivé. Qu’elle soit endurante ou pas, elle aurait dû se sortir seule de cette situation pour gagner son respect. C’était ainsi qu’il voyait les choses mais pour tout vous dire, il n’avait pas toujours suivi ses convictions à la lettre; quelque chose qu’on pourrait lui reprocher à le connaitre. C’est juste qu’à ce moment, il n’en avait rien à faire de cette femme et si elle avait eu besoin d’aide pour échapper au sort qu’il lui réservait c’est qu’elle ne devrait tout simplement plus être vivante. Pas qu’il souhaitait à tout prix remédier à cette situation. À vrai dire, il souhaitait surtout connaitre ses intentions.
Tu étais connectée aux flammes qui attisaient les monologues fades des interlocuteurs qui profitaient de cette soirée pour exhiber leurs fourberies comme s’il s’agissait d’un trophée bien mérité. Stimulé par la soif du sang, les rires s’amplifiait plus l’histoire était torride. Comme le feu qui dévore le bois, ces hommes étaient pleins de vie alors que tu n’étais plus que la cendre laissée derrière par des hommes comme eux. Si tel avait été ton état, tu sentais qu’une toute nouvelle flamme grandissait en toi : la flamme de l’enfer, tant pis pour tous ceux qu’elle dévorera !
Tu avais détourné le regard de ton élément pour observer cette silhouette qui s’appropriait la force des ombres. C’était une force que tu n’avais pas manquée de connaitre le jour de ton arrivée, même que c’était celle qui t’avais mené jusqu’ici dès que tu avais posé les pieds dans son piège. Aucune motivation n’avait semblé guider les actes qu'il avait posé contre ta personne. Ni haine, ni colère, il s’était simplement contenté de te faire du mal. Toi qui brulait de toute la colère du monde, tu ne pouvais lui en vouloir plus qu’à d’autre puisque tu le détestais déjà avant même de le rencontrer. C'était peut-être difficile à comprendre mais tu étais intrigué par cet aspect de sa personnalité. Toi, qui cherchais à te reconstruire à l’image des ténèbres de l’enfer, comment pourrais-tu nier qu’un démon puisse avoir une partie de ton être à t’offrir ?
Les blessures infligées contre ta personne n’étaient que de chair, les blessures psychologiques sont beaucoup plus douloureuses et marquent sa cible pour des siècles à venir, si l’on croit aux esprits vengeurs, ce que tu ne manquerais pas d’advenir si une telle chose était bien réelle. Plutôt que de lui partager ces choses, tu avais préféré te taire. Inutile de lui donner plus de munitions. Ce n’est qu’en t’appâtant d’une métaphore sans bon sens, qu’il était parvenu à te soutirer une réplique.
« Et si j’étais l’œuf, tu étais la poule ? Tu ferais une vilaine mère, vaudrait mieux qu’on t’écorche vif. »
Insinuait-il vraiment que ses actes t’auraient aidé à grandir ? La porte des morts n’était pas la cour des grands, c’était un lieu de repos alors qu’est-ce que tu avais à apprendre en le regardant écraser le foutu œuf dans lequel tu te trouvais ? Là était son intention, il ne pouvait le nier, même que selon les murmures qui l’entouraient, il n’aurait pas hésité à s’en faire un œuf à la coque.
« J’étais peut-être prise au piège mais je te rappelle que tu t’es retrouvé au sol, sous une lame prête à t’achever. Tu as été épargné de la même façon que je l’ai été alors ne viens pas jouer aux êtres grandiose par ici ! »
Tu avais agrippé l’épée que t’avait offerte ton sauveteur pour la pointer en direction de celui que tu ne pouvais plus permettre de te blessée, peu importe l’arme qu’il utiliserait. Qu’elle soit aussi minime que sa langue tordue ou bien aussi tranchante qu’une lame bien aiguisée.
« Si tu tiens à ton fichu œuf, tu devras le récupérer sans l’aide de tes pièges cette fois ! Viens voir qui s’en prendra plein la figure ! »
Des acclamations brandirent dès que les hommes avaient reniflé le combat mais là n’était pas la source de tes motivations. En réalité, tu espérais gagner le respect des démons ici présent. Ils étaient la source capable d’alimenter le feu qui brulait en toi. La noirceur que réclamait ton cœur pour porter à fruition ses plus sombres désirs.
Une vilaine mère, mais comment? Ce commentaire avait si peu de sens qu’il lui soutira un sourire. Elle blaguait, pas vrai? Tout de même, Kaede devais admettre qu’elle n’avait pas tort, peut-être qu’on a tous eu droit à un peu d’aide à un moment dans notre vie, c’est juste que cette histoire n’avait pas permis à cette étrangère de faire ses preuves face à lui et il n’avait rien vu d’autre que l’image de la victime pour la représenter. De toute évidence, elle n’avait pas l’intention de garder cette position, arme pointé en direction de celui qui aurait pu être son bourreau, elle lui laissait savoir qu’elle n’hésiterait pas à se défendre s’il tentait de reprendre cette position.
« Je n’avais plus l’intention de te faire du mal, j’ai accepté ma défaite. »
Il lui révéla tout de même le canif qu’il tenait caché dans son grand manteau noir, le faisant tournoyer entre ses doigts tout simplement parce que c’était la seule arme qu’il détenait à ce moment. Bien sûr, il tenterait de se défendre si elle choisissait de passer à l’attaque mais l’arme qu’il possédait ainsi que son expertise peu développé en corps à corps lui réservait une défaite quasi-certaine. Quoi qu’il en soit, Kaede préférait généralement éviter les affronts directe, tout simplement parce qu’il n’était pas suicidaire mais la mort n’était pas une chose dont il craignait et il n’allait certainement pas la supplier de ranger son arme.
« Je ne reculerais pas face à toi si tu souhaites te venger mais ce n’est pas un combat très juste. »
Il tendit la main vers un homme qu’il connaissait assez bien pour savoir qu’il souhaiterait rectifier cette situation. Ce dernier déposa une épée semblable à celle de son adversaire dans sa main; voilà que le combat était beaucoup plus équitable.
« Je n’ai pas l’intention de te tuer mais si je gagne… tu m’appartiendra. »
Rajouta-t-il pour donner un sens au combat qui s’annonçait parce qu’il n’allait quand même pas lutter pour rien du tout. Peut-être qu’une récompense s’offrirait à lui en la tuant mais il avait droit à ce genre de récompense régulièrement; oh, oui, il adorait le goût de la chair humaine mais peut-être bien qu’elle lui avait donné goût à tout autre choses. Bien sûr, elle avait toujours la possibilité de reculer face au combat mais si elle souhaitait obtenir sa vengeance, elle devait être prête à faire face aux conséquences si elle échouait; Kaede n’était pas assez sympathique pour permettre à une cible vaincu de partir sans profiter de sa victoire de façon quelconque. Il ferait quoi, exactement? Tout dépend, il était capable de bien des choses mais il n’irait pas toujours jusqu’à exercer le pire de ses instincts. D’une certaine façon, il lui arrivait d’être plus généreux que d’autres fois.
Notes concernant le combat:
Je suis prête à permettre à Margaret de vaincre Kaede si elle décide de le combattre, tant qu’elle ne le tue pas. Tout dépend de ses capacités en combat aussi; Kaede n’est pas un grand combattant mais il à quelques bases, tout de même. Si tu penses qu’il pourrait la vaincre et que ça t’irais tout aussi bien, je t’invite à utiliser les dés. (Il ne lui ferait rien que tu n’es pas d’accord si jamais il gagne. Ça sonne mauvais tout ça parce qu'il est mauvais mais ça pourrais facilement être rien de très grave.
Ta vie passée à servir une famille impitoyable ne t’avait pas appris l’art du combat et le peu de leçons que tu avais reçues de ton allié n’avait pas laissé temps au fruit de fleurir. Mais tu savais que si tu reculais cette fois, les autres continueraient de pousser plus loin et plus fort jusqu’à tout t’arracher et tu ne pouvais plus le permettre. S’il ne reculait pas, ainsi votre sort était encré : l’un devra tuer l’autre. C’est ce que tu t’imaginais avant qu’il n’affirme le contraire. Loin d’être rassurantes, ses paroles avaient semé ta colère. Lui appartenir ? Plus jamais tu n’appartiendrais à qui que ce soit ! Resserrant la poigne de ton arme, ton regard à lui seul aurait dû suffire à lui réciter la plus profonde de tes penser. Plutôt mourir que de te retrouver dans les chaussures d’une servante !
«Ne te fait pas d’idée, espèce de taré !»
Tu hurlais en te précipitant vers lui, déterminée d’enfoncer ton épée dans ce cœur dont tu enviais la noirceur. Inutile d’être une grande guerrière pour le vaincre, tu n’avais pas oublié à quel point ton sauveur l’avait dominé et tu étais convaincu que tu pourrais y parvenir. Cependant, l’homme qui t’avait libéré de son emprise était beaucoup plus fort que tu pouvais l’imaginer et Kaede avait la capacité de répliquer face à un adversaire inexpérimenté, quelqu’un comme toi. Étais-tu même parvenue à le blesser ? Tes sens s’étaient noyés dans l’adrénaline et le vacarme de la foule qui gueulait si fort que tu avais l’impression que ton crâne allait exploser. Lame pointée vers toi, tu avais l’impression que ton corps ignorait complètement les ordres que lui livrait ton cerveau. Était-il aussi bien parti en rébellion, ou était-ce plutôt cet homme qui avait quelque chose à y voir ? Tu avais appris qu’il jouait régulièrement dans le poison lors de votre première rencontre mais tu ne t’imaginais pas qu’il irait jusqu’à empoisonner son arme lors d’un combat. Bien que ses techniques soient douteuses, il aurait très bien pu t’achever s’il l’avait souhaité mais cet être dévoué à la noirceur jouissait sans doute à l’idée de faire de toi sa propriété.
«Je n’appartiens à personne ! Ce sont mes chaînes qui m’ont poussé à m’enfuir jusqu’ici et je mourrais bien avant qu’on m’enchaîne tel un chien !»
Crias-tu, dans l’espoir que ta voix surpasse celle des spectateurs enjoués, c’était un fait dont tu souhaitais faire entendre : si telle était ses attentes, il allait d’abord devoir te tuer.
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